H.D.Bui (X57) Dr h. c. de l'Université TônDucThang

Présentation de l'oeuvre scientifique de H.D. Bui par DANG van Ky Dir. de rech. au LMS - Ecole polytechnique 24-8-2012_Bui_Huy_Duong.JPG

Après des études à l’X (promotion 57) puis à l’Ecole des Mines de Paris, H.D. Bui rejoignit le Laboratoire de Mécanique des Solides (LMS) nouvellement créé par le Professeur Jean Mandel en 1961, où il a commencé à travailler comme ingénieur. Il avait été embauché par EDF et mis à la disposition du Laboratoire. Cette double appartenance a façonné de façon définitive toute sa carrière de chercheur et d’ingénieur. C’est ainsi que tout en résolvant des problèmes industriels difficiles, Bui sut toujours en tirer partie pour déduire des solutions élégantes (souvent explicites) ou des concepts scientifiques nouveaux, en se laissant guider par son « sens de l’ingénieur ».

A l’époque, le programme électronucléaire français démarrait, et on accordait beaucoup plus d’importance à la physique et la chimie qu’à la mécanique. Ce n’est que par la suite qu’on s’est rendu compte de l’importance de cette dernière science, et de son rôle essentiel dans les études pour la sûreté nucléaire.

H.D. Bui a commencé sa carrière comme expérimentateur, chargé par le Professeur Mandel de vérifier expérimentalement la justesse de sa théorie sur le potentiel plastique multiple. Pour cela, il construisit lui-même, et pour une somme très modique, une machine d’essai de traction-torsion originale qui lui a permis de mener à bien des essais qui restent encore parmi les plus pertinents dans ce domaine réalisés à ce jour. En même temps, il développa sa théorie du polycristal et établit pour la première fois les relations générales qui ne sont pas de simples relations de moyennes spatiales, et qui relient les grandeurs microscopiques (à l’échelle des grains) aux grandeurs macroscopiques. Il fut ainsi le premier au LMS à ouvrir la voie aux études portant sur le passage micro-macro, études qui furent développées par la suite par différents chercheurs du LMS (et hors du LMS) utilisant les approches auto-cohérentes qu’il a contribué à populariser.

Avec le développement des centrales nucléaires, la Mécanique de la Rupture devint à partir des années 70-80 un sujet de préoccupation majeure pour EDF ainsi que pour les Autorités de Sureté Nucléaire. Bui fut naturellement amené à s’intéresser à ce sujet, déjà bien étudié aux USA mais encore relativement nouveau en France. Grâce à sa grande culture mathématique, et son goût prononcé pour des solutions explicites exactes, H.D. Bui a pu apporter des avancées fondamentales. C’est ainsi qu’en travaillant sur les lois de conservation, il a introduit une série d’intégrales invariantes en élastostatique et en élastodynamique, fort utiles pour calculer dans des cas complexes les taux de restitution d’énergie ainsi que les facteurs d’intensité de contraintes ou de déplacements (ces derniers, duaux des facteurs d’intensité des contraintes, ont été introduits par Bui). La première intégrale publiée en 1973 est l’intégrale I, duale de l’intégrale J de Rice très utilisée alors en mécanique de la rupture ductile, mais dont l’interprétation énergétique présentait encore bien des difficultés. L’introduction par Bui des modèles de fissure dans un milieu élastique-fragile et élastoplastique- fragile a contribué à clarifier complètement toutes ces notions, qui à l’époque, étaient encore floues. D’un point de vue théorique, avec ses collaborateurs, il a développé de nombreuses solutions explicites d’une grande utilité théorique mais également pratique car elles permettent à l’ingénieur de mieux comprendre la portée et les limites des modèles et méthodes à mettre en œuvre.

La Mécanique de la Rupture a tout naturellement amené Bui à un autre sujet : les problèmes inverses. Il s’agit notamment de pouvoir détecter et localiser des défauts dans les structures à partir de mesures indirectes non destructives. Là encore ses contributions furent nombreuses: plus de seize publications sur des sujets variés allant des fissures à la recherche de tombeau inconnu dans la pyramide de Kheops par gravimétrie en 1986. Ce dernier travail n’a pas permis de découvrir de chambre secrète, mais il a révélé une structure interne de moindre densité s’élevant en spirale et qui coïncide avec les propositions les plus récentes sur la façon dont la pyramide de Khéops aurait été construite ! L’importance des travaux de Bui dans ce domaine est internationalement reconnue. Ainsi, son livre Introduction aux Problèmes Inverses en Mécanique des Matériaux a été traduit et publié en anglais, en russe, en japonais, en chinois et en vietnamien ! Son autre livre plus récent, Fracture Mechanics. Inverse Problems and solutions publié chez Springer a été traduit en russe et en vietnamien !



Plus récemment, dans un article théorique de synthèse, Bui note que les notions de dualité, de symétrie et de perte de symétrie sont à la base de ses travaux. Il montre que la dualité est le bon outil pour restaurer la symétrie entre équations et variables et pour établir des intégrales véritablement indépendantes des contours afin d’ évaluer certaines quantités de la Mécanique de la Rupture. Quant à la perte de symétrie, elle est pour Bui la notion fondamentale à la base de méthodes exactes destinées à résoudre des problèmes inverses pour la détection des fissures. Tous ceux qui ont eu le privilège de travailler avec Bui reconnaissent en lui un chercheur hors pair qui a ouvert de nombreuses voies nouvelles en Mécanique et dans les Sciences de l’Ingénieur. Sa grande notoriété lui a valu d’être sollicité pour faire partie de comité de rédaction de revues scientifiques internationales, en mécanique et en mathématique, de premier plan.

Les distinctions qui lui ont été accordées au cours de sa carrière sont la reconnaissance de ses qualités scientifiques exceptionnelles: H.D. Bui est membre de l’Institut de France, Académie des sciences (1995), membre de l’Académie de Technologie (2001), Membre de l’Académie Européenne des Sciences (2001). Chevalier de la Légion d’Honneur (2008). H.D. Bui est Docteur Honoris Causa de l’Université Ton Duc Thang de Ho Chi Minh Ville ( août 2012). Ses contributions par les traductions de ses livres en vietnamien pour aider le pays, ne sont pas étrangères à la distinction récente décernée par l’Université Ton Duc Thang.

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